Avec plus de 10 ans de carrière, 4 albums à son palmarès et des featurings avec entre autres Orelsan et Diamond Deuklo, The Toxic Avenger revient en force avec son nouvel album « Midnight Resistance », sorti le 29 mai dernier. Brillant d’éclectisme, cet album électro se trouvera à coup sûr dans vos playlists estivales !
The Toxic Avenger, alias Simon Delacroix, a partagé avec moi sa bonne humeur et sa passion pour la musique.
Comment as-tu vécu cette période de confinement ? A-t-elle été source d’inspiration ?
Je l’ai très bien vécue, c’est terrible à dire ! (rires) Ça ne changeait pas grand-chose à ma vie de base vu que je suis tout le temps en studio, enfermé chez moi. Après je n’ai pas bossé sur de nouveaux morceaux car mon album était déjà fini. J’ai plutôt profité de mes vacances chez moi, ce qui n’est pas franchement horrible !
Tu t’es découvert de nouveaux talents ?
J’ai pu perfectionner ma cuisine mexicaine. (rires)
Tu as sorti Midnight Resistance le 29 mai dernier, quels sont les retours que tu as eu pour l’instant ?
J’ai de bons retours ! Et sincèrement, malgré que ce soit facile aujourd’hui sur internet de dire qu’une musique est de la merde, et bah là bizarrement je n’ai pas eu de mauvais retours ! Que des choses positives c’est une première pour moi. Et ça fait très plaisir, car les gens ne se rendent pas compte quand ils disent du mal de ton projet alors que ça fait plus d’un an que tu travailles dessus. Mais c’est la même chose dans tous les métiers ! Imagine t’es maçon : tu mets plusieurs jours à fabriquer des murs et les gens en passant te disent « pas ouf tes murs » !
Il y a plusieurs collaborations sur cet album, comment les as-tu choisies ?
Il y en a certaines qui étaient évidentes. Ma femme chante sur mon disque, vu qu’elle est avec moi tout le temps. Pour la plupart c’est des gens que je connaissais d’avant et avec qui ça me faisait plaisir de travailler : Ornette par exemple, ou encore Maxence qui était dans le même label que moi. Jay-Jay Johanson, c’est celui que je connaissais le moins. C’est un mec que j’écoutais beaucoup quand j’étais jeune et du coup j’avais vachement envie de faire un morceau avec lui. Je lui ai demandé, en craignant qu’il dise non car j’ai un vilain syndrome de l’imposteur. Mais il a direct dit oui !
Ce syndrome de l’imposteur, comment tu peux l’expliquer ?
C’est terrible ce truc, et ça porte bien son nom : t’as l’impression que les gens vont découvrir que t’es un imposteur. Ça bloque pour avancer parfois car tu as l’impression que personne ne va s’intéresser à toi. Par exemple j’ai toujours la peur de découvrir qu’il y a pas plus de 100 personnes qui m’écoutent sur Spotify. Et ça ne me quittera jamais malheureusement, ça fait partie de ce que je suis! Quand quelqu’un me hèle dans la rue pour me dire qu’il aime bien mon travail, ça fait 15 ans que je suis choquée !
Qui aimerais-tu avoir en featuring un jour ?
Tellement de gens que je n’oserai jamais appeler… Le problème c’est que j’écoute beaucoup de musique de gens morts donc je ne pourrais jamais. J’écoute de la musique des années 70, des nineties, des vieilles idoles. J’ai contacté des gens que j’admire depuis longtemps, mais ils demandent des sommes incroyables. Sinon dans l’immédiat, il y a un nouveau rappeur que j’aime beaucoup qui s’appelle Achille. Je trouve que c’est un chouette mec !
Quel est le moment ou le lieu idéal pour écouter Midnight Resistance?
Pour la première fois, ce n’est pas un disque très triste. Pour certains morceaux, il peut s’écouter au soleil, ou sur la route. Puis vu le titre, la nuit aussi. Sur la route de nuit donc (rires)
Quel est morceau dont tu es le plus fier et pourquoi ?
Celui avec ma femme qui s’appelle « Falling Apart ». Dans ce morceau il y a les mots « effondrement imminent » et je me dis que c’est mes deux secondes préférées de toute ma carrière. Va savoir pourquoi ! J’aime bien aussi « On Sight », il est chouette car il est différent par rapport à d’habitude : j’ai utilisé un vieux magnétoscope, j’ai fait une boucle avec la bande magnétique pour que ça fasse une sorte de sample. Pour le coup, c’était techniquement difficile. Il y a aussi « les Heures » car c’est le premier morceau où je chante vraiment. Je chante en français une histoire d’amour pour la première fois, sans artifices. Je suis fier de l’avoir sorti, d’avoir assumé.
On ressent un certain éclectisme dans ton album, avec un mélange de genres : disco, indie pop, rock,…. etc : dans quelle mesure est-ce important pour un artiste d’être un véritable caméléon, tout en gardant son empreinte musicale ?
Il y a beaucoup de gens pour qui c’est une faiblesse d’avoir peur de changer de genre. Mais moi, je m’emmerde car je ne fais que de l’électro. J’ai besoin de mélanger les trucs, d’aller à droite à gauche. Mon album est certes divers, mais il y a lien entre tous les morceaux, c’est un synthé bien particulier qui s’appelle le Juno 106 de Roland que j’ai utilisé sur tous les morceaux. C’est un peu mon objet fétiche. C’est comme dans Top Chef, les gars ils font du bœuf avec de la crevette et ils disent « oui mais il y a un lien, c’est du bœuf au jus de tête de crevette ! »
C’est le 4ème album que tu sors et 3 ans séparent Globe avec Midnight resistance : Quelle évolution as-tu senti au fil de tes différents albums ?
J’ai sorti mon premier album en 2009, donc j’avais moins de 30 ans. Je commençais à faire de la musique et je n’y connaissais rien. J’ai sorti un premier disque par hasard, j’ai fait des trucs spontanés. J’ai appris à évoluer avec mon public. Donc forcément qu’il y a une évolution. Aujourd’hui, c’est le premier album où j’ai conscience que je maîtrise mon sujet, que je sais où je veux aller. J’ai un truc dans la tête et j’arrive à le coucher assez vite. C’est une sensation très agréable que je ne connaissais pas trop. Avant, la plupart de mes morceaux était des accidents : je voulais tenter une chose, je n’y arrivais pas et ça donnait autre chose. Et cet autre chose parfois me plaisait. Ce n’est pas vraiment un accomplissement, mais plutôt une nouvelle étape. Ce sera un accomplissement quand j’aurai 30 ans de carrière, qu’il n’y aura plus d’albums et qu’on sortira un best of ! (rires)
Vu que tu y es actuellement , raconte-moi une journée-type en studio !
Tu veux la version romantique ou la vraie version ? (rires) La vraie version c’est que tu te lèves à 8h pour te donner bonne conscience, tu regardes des vidéos YouTube, tu fais 4-5 notes de clavier jusqu’à minuit, tu vas manger et tu reprends ! (rires) Il y a quelques fois où tu vas faire 3-4 notes à 11h et il te faudra jusqu’à minuit pour développer ton idée. Mais je pense que c’est impossible de se poser au studio et d’être inspiré toute la journée. C’est comme un écrivain : parfois t’écris trois mots, parfois 50 pages. C’est pareil pour moi, parfois j’écris 4 notes que je trouve nulles, parfois j’écris 2 morceaux dans la journée que je trouve biens et que je garde pour un disque. Faut juste se mettre dans une ambiance. Moi je regarde des films, je fais des branchements avec mes synthés, j’essaye d’aller découvrir d’autres choses. Pour trouver l’inspiration, il faut divaguer selon moi.
Est ce qu’il y a un moment plus propice à l’inspiration ?
Quand j’étais jeune c’était la nuit. Maintenant que j’ai une vie de famille c’est le jour, mais pas par choix ! La nuit c’est cool parce qu’il n’y a pas un bruit, tu es tout seul donc c’est plus propice à l’inspiration. Mais c’est comme beaucoup d’artistes, quand je ne suis pas face à mes instruments j’ai plein d’idées, par exemple quand je suis en vacances, et là je me dis « mais pourquoi je n’ai pas pris mon matériel ? » (rires)
Quel a été ton coup de cœur musical du confinement ?
Attends il faut que je regarde ma playlist Spotify, mais j’en ai quasiment tous les jours. Il y a Limousine qui a sorti un album qui s’appelle « L’été suivant », et l’album de Yuksek aussi !
Avec cette crise exceptionnelle, qu’est ce qui peut sauver les artistes ?
Certainement pas le gouvernement, vu ce qu’ils proposent. Encore une fois, on va malheureusement devoir compter que sur nous-même. Ça ne me touche pas directement en soi car je fais peu de concerts. Sur ce qui peut sauver les artistes, c’est terrible mais pour l’instant je n’ai pas de réponses. Et ça fait vraiment flipper.
Si je te dis : Les artistes doivent se renouveler, faire preuve de créativité pour se réinventer. Tu me dis quoi ?
Le artistes font ce qu’ils veulent ! (rires) Il y a des artistes qui se renouvellent tout le temps comme Bowie par exemple. Mais il y en a d’autres qui font la même chose depuis trente ans, et qui le font très bien. A titre personnel, je trouve ça cool de se renouveler, de trouver une nouvelle facette à la pâte que j’ai à chaque album. C’est comme Orelsan, à chaque album c’est une nouvelle facette de lui qui surgit. Mais je ne blâme vraiment pas ceux qui ne se renouvellent pas.
Justement, j’ai vu que tu avais fait un feat avec Orelsan, comment vous êtes-vous rencontrés ?
C’était il y a longtemps, je connaissais le mec qui l’avait signé, j’avais écouté son album. J’avais trouvé ça cool et je me suis dit que j’aimerais bien faire un morceau avec lui. On s’est rencontré et on est devenu pote assez rapidement. Et puis ça m’a amené à connaître Diamond Deuklo qui est son ami d’enfance, qui est devenu mon tour manager. Ça nous a amené Orelsan et moi à produire des morceaux pour Claude (Diamond Deuklo). Et puis Orel est devenu ce qu’il est devenu, et personne ne l’attendait là !
Pour The Toxic Avenger, est ce que musique rime avec image ?
Je suis fils de photographe, alors tout rime avec images ! Mon album est partiellement instrumental, donc je trouve ça cool d’avoir un point de référence comme l’image pour avoir une idée du morceau.
Quels sont tes projets pour cet été ?
Je vais bosser sur la suite de Midnight Resistance. J’ai aussi un podcast avec ma femme qui s’appelle « Discorama » qu’on va continuer cet été. Je vais aussi bosser avec Deuklo. Je viens de déménager de Paris vers le Sud donc je vais reconstruire mon studio. Et puis préparer des choses à sortir pour la fin d’année !
Merci beaucoup Simon pour cet échange !
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