En 2011, sortait votre premier album, Le Régal, que s’est-il passé de cette période à aujourd’hui ?
Nous avons énormément tourné avec cet album. À un moment donné, je n’avais plus de tourneur, donc j’ai commencé à écrire la moitié d’un nouvel album, sans aboutir. C’est en 2016 que je suis retournée sur scène, avec de nouveaux musiciens, et j’ai eu un choc : je devais arrêter de proposer quelque chose de trop produit, trop moderne. J’avais envie d’une musique plus live, d’autant plus organique.
« La Nébuleuse » n’est pas à la mode pour vous ?
Je pense que les sonorités que j’aborde dans cet album ne sont pas forcément les plus accessibles. En tout cas, ce sont toujours mes meilleures partenaires ! Je n’arrive pas à courir derrière quelque chose qui « marche », certains artistes sont malins et arrivent à passer à travers. Moi, je reste dans une optique d’authenticité.
Vous avez donc opté pour l’honnêteté…
Exactement. Mais ça a été une expérience douloureuse au départ. On a peur que ce soit mal reçu, mal interprété. C’est une musique très personnelle.
« La Nébuleuse » semble détruire le mur entre vous et l’auditeur. Il est aussi très sombre. Vous aimez projeter votre vie personnelle sur votre art ?
Mon entourage dit souvent que je suis de nature joyeuse, du coup ma musique peut surprendre, puisqu’elle est contrastée. Profondément : je suis intéressée à l’humain. Je mène mes combats avec la musique, sans tomber dans la caricature, dans la lamentation.
Cette noirceur se remarque également sur la pochette ; où l’on vous voit, couverte d’une sorte de buée, où les gouttes d’eau coulent sur votre visage…
C’est une image forte, qui s’inscrit bien dans le propos de l’album.
« Appartenir au large », « naviguer », « en sueur »… beaucoup de titres qui tournent autour du champ lexical de l’eau…
Je n’y avais pas forcément pensé… c’est intéressant ! Parfois, lorsqu’on compose, on ne se rend pas compte de ce genre de détail. Pour sûr, il y a quelque chose de très féminin dans cet album. Pendant « Le Régal », j’étais dans cette période charnière entre l’adolescence et l’âge adulte. Aujourd’hui, avec tout ce qui est arrivé dans ma vie, je m’affirme dorénavant comme une femme. Le morceau « Tout cela » par exemple, traite de l’avortement. La féminité est un thème central de ce nouvel album.
Le dernier titre se nomme « Je suis la terre ». C’est la fin du voyage, le retour sur le solide après la croisière. C’est la preuve d’un album concept ?
« Je suis la terre » est avant tout un morceau qui parle d’une relation sur le long terme entre deux personnes. Dans un couple, au bout d’un moment, les entités sont forcément attirées par d’autres, certaines pensées vrillent vers la nouveauté. Pourtant, ils sont reliés par quelque chose qui surpasse tout ! La femme dit « je suis la terre » et lui est le soleil. Deux astres qui sont intimement liés par un fil incassable.
Penser à l’inconnu n’est en effet pas un acte de tromperie envers son ou sa partenaire…
C’est juste une idée de liberté. L’amour rend libre. « Je suis la terre », c’est vraiment l’image de la femme qui s’assume, sans tomber dans un féminisme pur et dur.
Vous parlez de la Terre, du Soleil… il y a donc un lien astronomique avec le nom de l’album, « La Nébuleuse », qui désigne aussi un objet céleste.
J’ai vécu plusieurs mois dans un couvent, ça m’a aidé à éveiller une sorte de spiritualité. Quand j’ai fait cet album, j’ai beaucoup réfléchi à ma place dans le monde en tant que femme.
Le morceau éponyme est plus électronique que les autres. C’est une direction artistique que vous aimeriez reprendre plus tard, plus en profondeur ?
Je pense que c’est une direction que j’ai prise auparavant. J’ai déjà composé des morceaux avec des boîtes à rythme, mais ils m’ont vite lassée. Je me sentais comme restreinte, les sonorités étaient plus « gentilles », comme déshumanisées. C’est sur scène que j’ai été frustrée. Je suis attachée au côté sauvage du live, que l’électronique ne pouvait pas m’apporter. « La Nébuleuse » fait du bien dans l’album, grâce à son aspect exceptionnel.
Quels sont les albums que vous écoutiez le plus dans la période de composition ?
J’écoute énormément de guitaristes, je suis une véritable passionnée de riffs. J’aime beaucoup Savages, Warpaint… c’est un mélange habile entre le rock et l’éthéré, qui permet d’aller en profondeur, c’est essentiel pour moi.
Si vous pouviez décrire votre album en un mot ?
Dans le fond, « La Nébuleuse » est un album de femme. Mais avant tout je dirai « humain ».
Merci Lisa. On pourra vous retrouver le 23 novembre à la Maroquinerie à Paris.
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